Faut-il encore faire aimer les maths ?
« Il faut aimer les maths pour réussir. » Combien d'élèves, de parents ou même d'enseignants ont déjà entendu ou prononcé cette phrase ? Elle paraît évidente : aimer une discipline faciliterait son apprentissage. Pourtant, cette idée mérite d'être questionnée. En mathématiques, comme dans d'autres matières, l'enjeu n'est pas de cultiver une passion immédiate, mais d'apprendre à comprendre, à progresser et à utiliser les savoirs. L'amour des maths peut naître en chemin, mais il ne peut être posé comme une condition préalable.
L'illusion du « il faut aimer »
Le problème de cette injonction, c'est qu'elle enferme. Dire à un élève qu'il doit aimer les maths revient à lui imposer une émotion qui n'est pas forcément la sienne. Face à cette pression, certains se sentent exclus d'emblée : « je n'aime pas, donc je ne réussirai pas ». L'attente de passion devient alors un obstacle supplémentaire. Or, on peut progresser sans être fasciné par la discipline, simplement en s'appuyant sur la curiosité, la rigueur ou le goût du défi.
De l'affectif au fonctionnel
L'enseignement des mathématiques gagne à sortir de cette logique affective pour entrer dans une logique fonctionnelle. L'élève n'a pas besoin d'« aimer » pour comprendre, mais d'expérimenter qu'il est capable de réussir pas à pas. La satisfaction ne vient pas toujours d'un « coup de foudre » pour la matière, mais du plaisir de voir ses efforts porter leurs fruits. C'est cette expérience de progression qui nourrit, petit à petit, un rapport plus positif aux mathématiques.
Quand le goût se construit
Cela ne signifie pas que le plaisir est absent. Au contraire, il peut et doit se construire, mais il apparaît souvent après coup. Un élève qui surmonte un blocage, qui parvient à résoudre un problème ou qui découvre une logique nouvelle ressent une forme de satisfaction. C'est dans ces moments que naît, parfois, une véritable affinité avec les mathématiques. L'enseignant ou l'accompagnant ne cherche donc pas à « faire aimer » de manière artificielle, mais à offrir les conditions d'expériences réussies.
Le rôle des enseignants et accompagnants
La mission des adultes n'est pas d'inculquer une passion, mais de créer un cadre où l'élève peut apprendre avec confiance. Cela passe par la clarté des explications, la valorisation des progrès, la tolérance à l'erreur et l'encouragement à persévérer. Dans ce contexte, le lien affectif avec la discipline se développe naturellement, sans être imposé.
Conclusion
Alors, faut-il encore faire aimer les maths ? La réponse est sans doute non, si l'on entend par là une injonction affective. Mais la réponse est oui, si l'on considère que l'amour des maths se construit progressivement, à travers les réussites, la confiance retrouvée et la découverte du sens. L'enseignant et l'accompagnant ne cherchent pas à provoquer une passion immédiate : ils ouvrent la voie pour que, dans l'expérience de l'apprentissage, l'élève puisse trouver ses propres raisons d'aimer… ou du moins d'apprendre avec sérénité.